De l'agnosticisme
« Je considère comme une sorte de stupidité folle de chercher la nature de Dieu, de s’interroger sur ce qu’il est. Car je pense que les hommes ne peuvent pas même comprendre correctement les affaires des hommes, et donc encore moins la nature de Dieu. » Procope
Bien des croyants ainsi que des adeptes de la religion du non-Dieu que sont les athées, taxent l’agnostique d'indécision ou pour le moins de perplexité. Il n’est donc pas inutile d’évoquer quelques-unes des raisons sur lesquelles son choix peut être dénué d'embarras. Ceci dit, l’auteur précise que toutes les croyances et opinions lui semblent d’autant plus dignes de considération qu’elles sont réfléchies, sincères, et respectent celles d’autrui.
Parce qu’il a insuffisamment – ou trop – conscience de sa condition, l’être humain est dominé par ses sentiments et ses émotions? au premier rang desquels figure depuis toujours – et à juste titre –, son angoisse existentielle. Pour y remédier, son imagination lui permet de se réfugier dans le roman, la poésie, la chanson – de la ritournelle au cantique –, le théâtre, le cinéma, la TV... Il s’abandonne de la sorte à l’utopie et au mystère, ces formes supérieures de la fiction, auxquelles s'ajoute l'usage des stupéfiants par ceux, toujours plus nombreux, à qui ces formes ne suffisent pas.
Son langage, dont le degré d’achèvement le distingue, entre autres spécificités, de la multitude des espèces peuplant notre univers connu, ainsi que les autres moyens d’expression et de communication dont il a su se doter, ne peuvent qu’y encourager l'homme ; d’autant plus que sa vanité y trouve confirmation de la distinction dont il serait l’objet de la part des Dieux, refusant bien entendu l’idée que Ceux-ci puissent être nés de ses propres fantasmes.
Son langage, dont le degré d’achèvement le distingue, entre autres spécificités, de la multitude des espèces peuplant notre univers connu, ainsi que les autres moyens d’expression et de communication dont il a su se doter, ne peuvent qu’y encourager l'homme ; d’autant plus que sa vanité y trouve confirmation de la distinction dont il serait l’objet de la part des Dieux, refusant bien entendu l’idée que Ceux-ci puissent être nés de ses propres fantasmes.
Car c’est précisément sa spiritualité qui différencierait avant tout l’homme des autres espèces. Mais cette spiritualité n’est-elle pas, comme son langage, une de ces facultés distribuées aussi inégalement que les autres, entre toutes les espèces peuplant l’univers ? Qui prouve que tel ou tel sujet peuplant celui-ci n’en soit pas doté sous une forme plus ou moins élaborée, restant à découvrir ?
Un seul des atomes dont l’homme est fait, lui est-il exclusivement réservé ? Outre l'immortalité dont ces atomes ont l'exclusivité parmi les innombrables éléments dont est fait l'univers connu, tous ne se retrouvent-ils pas dans les éléments constituant son environnement ; qu’ils soient liquides, solides ou gazeux, animés comme inertes, vivants ou morts, chauds ou froids, visibles ou invisibles… ? En quoi l’homme se distinguerait-il dès lors, de tout ce qui peuple cet univers ? Quoi d’autre qu’un imaginaire débridé l’a mené à se voir promettre une existence éternelle ? Son espèce ne disparaîtra-t-elle pas un jour, avec l’âme ou plus simplement le souvenir auquel il a la vanité de donner ce nom et son habitat qu’est la Terre, sans que le cosmos n’en manifeste davantage d’émoi que pour l’anéantissement de n’importe quelle étoile, comme il s’en produit à chaque instant parmi les milliards de milliards offertes à sa vue ?
Il s’avère en tout cas qu’en l’absence de réponses autres que celles fournies par des mystères et des révélations dont la signification est réservée à ceux qui ont la foi, des hommes ont de tous temps compris le pouvoir sur leurs semblables qu’ils pouvaient tirer de leurs peurs ; pouvoir d’autant plus grand que ces peurs et la crédulité qui les attise sont partagées. Très tôt, à l’échelle de nos civilisations, des individus ont compris le pouvoir sur leurs semblables que pouvait leur donner, pour le meilleur et pour le pire, le contrôle de leur spiritualité. Plusieurs ont dès lors pu apparaître comme les ambassadeurs de leurs croyances, chargés de faire connaître et de codifier celles-ci, dans les circonstances et les mœurs de leur époque, là où ils se sont manifestés. La surenchère née de ces initiatives a pu ensuite évoluer en guerres, suscitées par l’ambition de conquérir un maximum d’adeptes. Puis, comme par un effet du balancier rythmant tant d’autres aspects de la vie, est apparue la nécessité de revenir à la réalité, en étudiant des faits avérés ; en raisonnant plus ou moins logiquement ; avec l’aide de l’expérimentation, jusqu’à la preuve à laquelle conduit la démarche scientifique. Mais là encore, l’espoir que celle-ci finisse par triompher de peurs, non plus dues aux mystères de la création, mais à celles résultant de découvertes d’un nouvel ordre, est sans cesse différé.
L’homme peut-il donc raisonnablement penser que cette science, parvenue à expliquer nos peurs – à défaut de les faire disparaître – annihilera la spiritualité de l’homme ? Voici qui paraît peu probable, tant elle semble être liée à la vie, dans le combat que celle-ci livre depuis son apparition, à un environnement lui opposant une résistance farouche, en même temps qu’il lui offre ce dont elle a besoin pour perdurer.
Telles peuvent être les raisons de l’homme qui, face à de telles incertitudes et à l’impuissance de l’espèce dominante à laquelle il appartient à les vaincre, choisit de s’en remettre à lui-même, pour se garder d'un abus de sentiments et d’émotions pouvant le faire dévier de cette option, ce que favorise la simple observation d'une réalité quotidienne accessible à tous.